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Halophila, exotique sous les Tropiques

Originaire de la Mer Rouge, Halophila stipulacea est une phanérogame marine invasive qui a fortement colonisé les fonds côtiers de l’archipel des petites Antilles. En Martinique, elle a été identifiée formellement pour la première fois en 2010 mais l’analyse, a posteriori, d’archives vidéo a permis de confirmer sa présence sur la côte nord caraïbe avant 2006.

Contrairement à la tristement célèbre Caulerpa taxifolia de Méditerranée, il ne s’agit pas d’une algue mais d’une Angiosperme (plante à fleurs), constituant de vastes herbiers généralement denses, sur des profondeurs comprises entre 0 et 40 mètres. En revanche, son caractère envahissant est tout aussi problématique : en provenance du canal de Suez, elle a colonisé, depuis la fin du 19e siècle, plusieurs secteurs de la Méditerranée, en progressant toujours plus vers la partie occidentale. Plus récemment, son apparition dans les petites Antilles (première observation officielle à Grenade en 2001) s’est suivie d’une rapide dissémination le long de l’arc antillais. Une fois de plus, l’agent initial de dissémination de cette espèce invasive est l’homme, par le biais du trafic maritime international et localement de la plaisance : le mouillage sur ancre dans des zones peu profondes colonisées par cette plante favorise la fragmentation des rhizomes et la constitution de boutures qui pourront ainsi s’implanter sur de nouveaux secteurs.

Avec une forte vitesse de croissance, l’espèce colonise différents types de fonds meubles nus (sables, débris coralliens fins, vases) mais aussi des espaces déjà occupés par des herbiers d’espèces autochtones : principalement l’herbe à tortue (Thalassia testudinum) et l’herbe à lamentin (Syringodium filiforme). Si Halophila stipulacea semble être consommée par les tortues vertes (Chelonia mydas) et qu’elle semble constituer un habitat de choix pour de nombreuses espèces d’invertébrés et les juvéniles de poissons, il n’en demeure pas moins qu’elle constitue une réelle menace pour les phanérogames marines autochtones et les espèces qui leur sont inféodées.

Hippocampe à long nez (Hippocampus reidi) sur un herbier à Halophila stipulacea © DEAL Hippocampe à long nez (Hippocampus reidi) sur un herbier à Halophila stipulacea © DEAL
Raie léopard (Aetobatus narineri) fourageant sur une herbier à Halophila stipulacea © DEAL Raie léopard (Aetobatus narineri) fourageant sur une herbier à Halophila stipulacea © DEAL

La DEAL Martinique a mené en 2012 un travail de cartographie pour évaluer la dynamique d’expansion de cette espèce. L’ensemble du linéaire côtier de l’île a été prospecté durant un mois pour caractériser la nature des herbiers de l’île. Les résultats sont sans appel : en quatre ans, l’Halophila stipulacea a fortement progressé et se retrouve désormais tout le long de la côte caraïbe et dans la plupart des baies de la côte atlantique. De nombreuses zones d’herbiers ont été profondément modifiées avec une raréfaction significative de l’herbe à tortue (Thalassia testudinum) et de l’herbe à lamentin (Syringodium filiforme), en particulier sur les zones de mouillage utilisées par les plaisanciers.
Si l'expansion semble aujourd'hui s'être stabilisée sur le territoire, la surface colonisée par cette espèce invasive est considérable.

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Herbier dense à Halophila stipulacea © DEAL Herbier dense à Halophila stipulacea © DEAL